NAJIB ABDELHAK, DÉCEMBRE 2024
Monia Rizkallah, cheffe d’attaque à la Deutsche Oper Berlin: A la recherche d’une partition universelle
La musique est peut-être l’exemple unique de ce qu’aurait pu être le monde s’il n’y avait pas l’invention du langage, la formation des mots, l’analyse des idées, la communication des âmes. La musique exprime ce qui ne peut être dit et sur quoi il est impossible de rester silencieux. La musique exprime le non-dit, le sens caché des êtres et des choses. Elle exprime leur essence. Et, souvent, elle en incarne la quintessence, cette cinquième essence, qui est la somme des quatre autres. La musique, c’est le Grand Œuvre. C’est l’Ars Magnus, dans son sens alchimique. C’est la musique des sphères. Le langage universel, celui du cosmos et de ce qui ne peut être défini ni appréhendé. C’est cette quête qu’a entreprise Monia Rizkallah, musicienne hors pair, qui officie à l’une des plus prestigieuses maisons philharmoniques, la Deutsche Oper Berlin.
Au-delà de sa maîtrise de son instrument, le violon, ce qui nous touche dans l’approche artistique de Monia Rizkallah, c’est sa faculté de voyager à travers de multiples univers musicaux, toujours avec la même passion, le même engagement et la même rigueur. Elle a cette capacité d’habiter ses projets et d’extraire d’elle-même la musique qu’elle interprète (et non qu’elle joue). Car, il est ici question d’interprétation, d’une autre lecture, qui vient s’ajouter à celle du compositeur lui-même, sous la direction d’un maestro, un chef d’orchestre, qui apporte sa vision, ses tempos, sa perception de l’oeuvre à offrir aux aficionados. Dans cette approche, Monia Rizkallah donne un réel sens à cette affirmation de Friedrich Nietzsche disant que «La vie sans musique est tout simplement une erreur, une fatigue, un exil». Une errance, sans territoire, sans patrie.
C’est également dans cette acception de l’œuvre musicale que Monia Rizkallah nous révèle comment s’est écrite l’histoire de la musique, avec ses influences multiples et ses sinuosités, nourries de différentes cultures et traditions musicales dans le monde, comment les instruments s’interpénètrent, communiquent, dialoguent, se taisent, se confient et offrent, au final, le silence, qui, lui aussi, fait partie de la partition. À écouter Monia Rizkallah, comme c’est le cas durant cette rentrée à l’Opéra de Berlin, au contact de Richard Wagner et de son immortel Tristan et Isolde, on se rend compte que pour tout spécialiste, les difficultés de concilier expérience esthétique et faits objectifs sont à la source d’une longue tradition analytique sur la musique qui, ici, avec les tonalités du violon de Monia Rizkallah nous offrent une poésie du vivant, qui va au-delà de ce qui peut être exprimé autrement qu’en notes, en mélodies et en silences. Ce qui nous renvoie, avec jubilation, à cette autre vérité émise par le père de Zarathoustra : «Par la musique, les passions jouissent d’elles-mêmes».
Sans oublier qu’avec Wagner, nous sommes dans les voisinages de Nietzsche, ami intime de la famille et surtout de Cosima Wagner, qui n’est autre que la fille d’un autre génie de la musique, Franz Liszt. C’est dire que les esprits qui président à la musique du monde ont des destinées à part, faisant croiser les époques et les mythes fondateurs de l’humanité. C’est cet univers qui est celui de Monia Rizkallah, un monde où les grandes tendances de la musique, de Ludwig Van Beethoven à Richard Wagner, de Johannes Bach, à Wolfgang Amadeus Mozart, en passant par Franz Schubert, Johannes Brahms ou encore Gustave Mahler, Piotr Tchaïkovski et d’autres grandes figures qui ont donné de nouvelles bases à la musique, sont décortiquées et remises au goût des jours, pour que vive cette musique savante, qui élève l’humain en nous, qui nous transcende et nous rend meilleurs.
On comprend alors aisément toutes les influences d’une musique occidentale très attachée à des cultures à la fois nordiques, latines, celtes, anglo-saxonnes et germaniques. Ce sont ces interactions qui ont nourri des musiques aussi profondes que l’héritage slave que l’on touche dans le travail d’auteurs comme Modest Moussorgski, Nikolaï Andreïevitch Rimski-Korsakov ou encore Sergueï Sergueïevitch Prokofiev, sans oublier le grand apport italien à cette universalité, à travers les œuvres de Monteverdi, Giuseppe Verdi, Albinoni, Rossini, Puccini, Bellini et autres Vivaldi, pour ne citer qu’une goutte dans un océan de beauté que Monia Rizkallah nous offre en partage, à chaque fois qu’elle entre en fusion avec son violon et nous invite aux pérégrinations de l’âme dans de hautes sphères que seules les âmes bénies arrivent à percevoir. Sans oublier ceci : «Et ceux qui dansaient furent considérés comme fous par ceux qui ne pouvaient entendre la musique», nous rappelle celui qui a écrit le Gai Savoir.
Car, la musique nous élève au-dessus des contingences de l’existence. Elle a le pouvoir secret de nous transporter au-delà des réalités de ce monde et d’imprimer à notre périple un voile de magie, une certaine alchimie qui transmute le vulgaire en beauté absolue. Et tout ce qui élève l’homme en nous mérite toute notre passion, nos égards et notre patience. Car un monde sans musique est un monde mort. C’est un monde de vide et de cruauté que seule la musique rend beau, viable, vivable, enchanteur comme Die Zauberflöt de ce génie qu’était Wolfgang Amadeus Mozart.

Ich freue mich sehr und bin bewegt, Ihnen das Plakat zum Film „Les évadés de Tindouf“ vorzustellen. Dieser großartige Film wurde von meinem Freund Abdelhak Najib inszeniert und er spielt die Hauptrolle. Der Film kommt am 6. November 2024 in Marokko in die Kinos und ich wünsche ihm den Erfolg, den er verdient.
Ich möchte Abdelhack Najib für das Vertrauen danken, das er mir entgegenbrachte, indem er mich als Komponistin und Violinistin mit seinem Film in Verbindung brachte. Es war eine äußerst bereichernde Erfahrung.
aus Tima Magazin 8 / 2023
Contrapunkt – Schmelztiegel Marokko
Diskussionssendung auf BR-Klassik in Zusammenarbeit mit dem Goethe-Institut

In einer Gesprächsrunde mit Rhani Krija (Percussionist, Köln), Mohcine Ramdan (Sänger und Gembri-Spieler, München) und Monia Rizkallah (Geigerin, El Akademia e.V., Berlin) war der respektvolle Musikaustausch auf „Augenhöhe“ Thema. Es moderierte Jay Rutledge. Hier ist das Statement von Monia Rizkallah und ihr musikalischer Beitrag als Auschnitt der Sendung vom 22. April 2021 zu hören.
Deutsch-Marokkanische Lebenswege

DEUTSCH-MAROKKANISCHE LEBENSWEGE – Geschichten über das Suchen, Ankommen und Engagieren. Ein Buchprojekt der Hochschule Magdeburg-Stendal und des Deutsch-Marokkanischen Kompetenznetzwerkes (DMK)
https://marokkanerindeutschland.jimdofree.com/
https://de.padlet.com/rahimhajji/Deutsch_Marokkanische_Lebenswege_Buch
Download: Der Beitrag von Monia Rizkallah (pdf)
Portrait télévisé sur Sky News Arabia
Article dans le magazine Le Temps

Interview – Al Bayane

Essay – Le Reporter



Essay – Finances News

Noël 2020
Sophia, ma petite fille de 10 ans, m’a demandé l’année dernière si le père Noël existait. C’est une question à laquelle la plupart des parents se trouvent confrontés un jour ou l’autre. Ceci dit, j’ai été prise de court et, après une brève réflexion, je lui ai répondu que je ne lui dirai pas si le père Noël existait ou non, mais que, par contre, je pouvais lui assurer qu’on trouvait dans le monde beaucoup de choses belles et étranges qui ne s’expliquaient pas logiquement. Elles sont si belles et si étranges qu’on les appelle « magie » ou « miracle ».
Ma fille n’a pas paru satisfaite de ma réponse. Elle a insisté. Alors, je lui ai demandé ce qu’elle ressentirait si elle apprenait que le père Noël n‘existait pas. Sans hésiter, elle s’est exclamée : « Ah non, surtout pas ça ! Ce serait trop triste ! » Elle avait raison, briser la magie de Noël aurait été bien triste. Je lui ai donc simplement répliqué en souriant : « Arrête alors de poser des questions ! »
Aujourd’hui, à quelques jours de ce Noël 2020 si particulier, des questions, je m‘en pose beaucoup.
Pourquoi ferme-t-on les lieux de spectacle ? Les théâtres, les opéras, les scènes, les cinémas. Lors de la première vague épidémique, le monde de la culture s’est mobilisé et a pris des mesures draconiennes pour permettre aux artistes de performer et au public d’assister aux représentations avec un sentiment jamais démenti de grande sécurité. Pourquoi ne plus le permettre aujourd’hui ?
Pourquoi a-t-on demandé à tant de responsables professionnels et associatifs de sécuriser leurs établissements pour maintenant les obliger à en laisser les portes closes ? Pour se mettre en conformité sanitaire, ils ont parfois dû emprunter et certains non actuellement plus d’autre choix que de « mettre la clé sous la porte ». Pour combien de théâtres le rideau est-il définitivement tombé ? Combien de cinémas ont joué leur dernière séance ? Et, tout ça, pourquoi ?
Pour des raisons sanitaires, bien évidemment ! Mais alors, pourquoi laisser d’autres lieux ouverts où les gens s’agglutinent en dépit des obligations de distanciation ? J’en ai été témoin. Je reviens d’un bref voyage à Bordeaux où j’ai vu des rues bondées de monde, des magasins ouverts beaucoup trop pleins, des personnes sans masque dans des endroits où son port était obligatoire. Comment cela est-il possible ? Et pourquoi ce couvre-feu en France. Ainsi, on peut sortir à 19 heures, mais plus à 20 heures ? Qu’est-ce qui le justifie, si je suis raisonnable et garde les mêmes précautions ? Alors oui, certains ont si peu de civisme et de scrupule qu’ils organisent des fêtes privées. Mais comment imaginer qu’un couvre-feu les arrêtera ?
Les questions se bousculent ! Je conçois les difficultés des tentatives de maîtrise du nouveau virus. Mais je sais que je ne suis pas la seule à ne pas comprendre la logique incertaine des permissions et interdictions. Et je vois que ces mesures prises pour gérer la crise sanitaire créent les conditions d’une crise économique dans certains milieux malheureusement dits « non essentiels », ainsi que celles d’une crise psychologique chez beaucoup, de toutes les générations.
Aujourd’hui, à quelques jours de la fin de l’année 2020, une lueur d’espoir apparaît avec la mise sur le marché des premiers vaccins anti-Covid. Je fais le vœu pour que l’on étudie aussi un vaccin qui soulagerait le mal-être que ressentent les millions de personnes qui souffrent dans leur âme de la Covid-19.
Le vaccin qui sauvegarde la santé psychique est à la fois coûteux et gratuit, simple et rendu inaccessible. Un air de violon, deux pas de dance, et ce sont bien des maux qui s’envolent. Les artistes et leur travail, essentiel ? Pas essentiel ? Je crois que ces mots « non essentiel » sont ceux qui me révulsent le plus ces derniers temps. Comment peut-on qualifier ainsi les artistes ? Ils sont des vendeurs d’oxygène, d’espoir, de rêves, de joie, de réflexion, d’amour. La liste n’est pas exhaustive et l’on pourrait la résumer en un mot « humanité ». Les artistes sont porteurs d’humanité, et nous en avons tous besoin particulièrement en ce moment de cette humanité, symbole de vie.
Certes, le dilemme est grand, les chiffres de la pandémie s’aggravent. C’est une réalité. Les artistes en sont aussi conscients. Faut-il pour autant attendre la fin de la pandémie pour rouvrir les lieux culturels ? Il y en a tant qui ont parfaitement fonctionné d’un point de vue sanitaire et que l’on a fermé. Pourquoi ? Pour ne pas faire de « jaloux » ?
Malgré tout cela, je suis comme ma fille. Je veux encore croire à la magie. Si je cesse mes questions et observe autour de moi, j’aperçois de belles actions. Des collègues et amis artistes se mobilisent pour collecter des fonds et venir en aide à Médecins sans frontières, aux personnes en détresse au Liban ; d’autres œuvrent pour le dialogue interculturel. Par leur art, ils aident à soulever des montagnes et soufflent sur les braises de l’espoir pour raviver la flamme de la vie.
Oui, nous sommes des artistes et, oui, les artistes sont essentiels à la vie, la « vraie » vie, celle où le corps et l’esprit s’épanouissent de concert.
Cette « vraie » vie va revenir, sans aucun doute. Même s’il faudra du temps. Je me joins à toutes ces personnes qui appellent à ce que les lieux de culture, si essentiels, rouvrent leurs portes. En respectant bien entendu, tous les protocoles et précautions demandés. Ils savent le faire. Ils l’ont déjà prouvé.
J’aurais aimé laisser un message léger pour les fêtes de fin d’année. Le contexte s’y prête difficilement, mais je prie pour que nous puissions fêter à nouveau la vie en 2021. Nous tous ensemble, cela se fera !
Monia Rizkallah
Le Temps des Femmes Libres

Ich bin meinem Freund Abdelhak Najib sehr dankbar, dass ich ein Statement in diesem wunderbaren Buch hinterlassen durfte. Ich möchte mit dieser Botschaft Mut machten, trotz der schwierigen Zeiten, die wir durchleben:

Als Musikerin, als Mutter, als Frau, als Weltbürgerin möchte ich mich zunächst meinen Dank aussprechen. Dank an die Frauen, die ihre Arbeit in den Mittelpunkt ihres Lebens stellen. Dank an diejenigen, die Frauen schätzen, und an die Frauen, die für sich selbst und für andere kämpfen. Aber machen Sie nicht den Fehler, mich für eine aktivistische Feministin zu halten: Ich träume von einer Welt, in der Frauen und Männer ihren Platz in gegenseitigem Respekt finden. Wir sind hier auf der Erde, weil Frauen und Männer seit Anbeginn der Zeit einander unterstützt, geholfen und geliebt haben. Wir brauchen einander im Jahr 2020, wie schon immer und für immer. Wie könnte es anders sein?
Das Jahr 2020 wird uns für immer prägen. Wer hätte gedacht, dass ein winziges Virus die Welt lähmen könnte? Die Covid-19-Pandemie hat viele Gesellschaften in die Knie gezwungen, viele Menschen auf die Straße geworfen und, noch schlimmer, viele Menschenleben gefordert. In dem Versuch, die Pandemie einzudämmen, haben sich Anweisungen und Einschränkungen vervielfacht. Masken und Barriere-Gesten waren die einzigen Waffen, um uns, unsere Familien und unsere Freunde zu schützen. Sie haben uns physisch voneinander ferngehalten. Das Internet wurde zum König und unsere Welt war für einen Moment eine virtuelle. Dabei haben wir verstanden, dass wir Hand in Hand zusammenarbeiten müssen. Wir brauchen dringend menschlichen Kontakt. Wie können wir Emotionen durch das Display eines Smartphones transportieren? Die Life-Erfahrung, das Dabeisein, kann niemals durch den Computer ersetzt werden.
Seit ich sieben Jahre alt war, habe ich viel darüber nachgedacht, was mich trägt und nährt: es ist zweifellos die Liebe zur Musik. Klassische Musik ist eine Schule des Lebens. Was kann sie uns angesichts des Corona-Virus lehren? In einer Symphonie organisiert die Partitur den Klang mit Nuancen und Rhythmen. Jede Stimme hat ihren definierten Ort und ihre sehr genaue Rolle – ist gleichzeitig Solist und Begleiter. Um ein harmonisches Ganzes zu bilden, müssen sich Musiker gemeinsam abstimmen, aufeinander hören und zusammen spielen. Die Musik zeigt uns also unbestreitbar, wie wir mit dieser Pandemie umgehen sollten. Und sie ist auch ein Gegenmittel gegen die Leiden der Seele, jetzt und für immer.
Abdelhak Najib
“Le temps des femmes libres”
150 portraits de femmes d’exception
400 pages, Format 30/30
Aux Éditions Orion